Issu d’une famille juive d’Alsace, l’écrivain et intellectuel communiste, Jean-Richard Bloch, fait la connaissance de Louis Massignon au service militaire. Ils se lient d’amitié, ainsi qu’avec leurs camarades de régiment, l’écrivain Roger Martin du Gard, le politiste André Siegfried, le haut fonctionnaire Jacques de Lacharrière, le journaliste Robert de Jouvenel…

Jean-Richard et Louis incorporent le 39e régiment d’infanterie à la caserne Hatry, à Rouen, le 10 novembre 1902. Leur diplôme universitaire leur permet d’être « dispensés », et de pouvoir faire un service militaire d’une durée réduite de dix mois au lieu de trois ans comme les fils d’ouvriers et de paysans. Cette différence de traitement accélère leur prise de conscience des inégalités sociales, ce qui donnera par la suite à l’un, le souci de la classe ouvrière, et à l’autre, celui du « prolétariat colonial ».
Ils partagent la même chambrée, les mêmes corvées et les mêmes marches, mais par-dessus tout, la musique les rapproche. Louis Massignon a loué un studio en ville pour y jouer du piano lors de ses moments libres; ils s’y retrouvent pour jouer à quatre mains Beethoven et Wagner. S’essayant au portrait psychologique, le jeune Louis décrit Jean-Richard Bloch comme faisant partie des « rêveurs d’action (action tendue comme dans le rêve, imagination reine) ». 

Les deux camarades se retrouvent en 1937, dans la « prise de conscience, suprêmement contraignante de la revendication civique du vrai qui incombe à tout intellectuel favorisé à l’égard des autres… ». Louis Massignon s’insurge contre le bombardement de Guernica, mais ne va pas jusqu’à Barcelone comme son ami, membre du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes (CVIA) et de l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires (AEAR). 

En 1947, après le deuxième conflit mondial que Jean-Richard Bloch a passé à Moscou, pour fuir la menace qui pesait sur lui en tant que juif et communiste, ils se rejoignent « pour demander à la France de rester dans sa vocation de noblesse, libératrice des peuples, en cessant d’asservir ses colonisés d’outre-mer ». 

Témoignages de Jean-Richard Bloch sur Louis Massignon: 

« Massignon est un garçon supérieurement intelligent et doué. C’est un grand travailleur. Malheureusement, s’il partage mes idées au point de vue critique, il ne les partage pas plus en ce qui concerne les événements futurs. Il n’est pas socialiste… »

 Lettre du 27 novembre 1902, BAALM, 9, 1999, p. 10


« Et surtout que j’y aurai acquis l’inappréciable amitié d’un homme d’intelligence aiguë, sagace, érudite, en même temps qu’affectif et délicat, musicien, et tout imbu de la grâce spéciale et quelquefois féminine que donne l’éducation catholique ». 

Lettre du 23 août 1903, BAALM, 9, 1999, p. 10



Bibliographie 

Louis Massignon, « L’amitié de Jean-Richard Bloch », Opera Minora, III, pp.545-555, et BAALM, n° 9, décembre 1999, pp.11-12

Daniel Massignon, « Les amitiés de régiment de Louis Massignon (1902-1903). Sa rencontre avec Jean-Richard Bloch et Roger Martin du Gard, BAALM, n° 9, décembre 1999, pp. 4-11

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