Le Père Borrmans, éminent islamologue et acteur-clé du dialogue islamo-chrétien post-Vatican II, était un disciple de Louis Massignon. Dans un texte de 2009, où il récapitulait « sa courbe de vie », il disait : 

« L’ascèse de l’étude et de la recherche, et leurs découvertes successives, m’ont alors encouragé à faire miennes les intuitions de Louis Massignon et les générosités de sa badaliya, spiritualité de compassion et de substitution. A mieux explorer les aventures de la grâce dans le monde de la mystique musulmane et de ses témoins les plus authentiques (pour L. Massignon, al-Husayn b. Mansûr al-Hallâj en était le modèle par excellence), j’ai découvert qu’il y a eu, en islam, des « justes » et même des « saints » à la manière musulmane : comment ne pas les accueillir, au nom d’Abraham, dans la tente commune où les trois hôtes de Mambré peuvent se manifester lors d’un certain partage ? Pour L. Massignon, en une espèce d’ordalie mystique, permanente et généralisée, entre croyants sincères et généreux, à la suite de ce qui ne fut réalisé ni à Médine entre Muhammad et les chrétiens de Najrân ni à Damiette entre François d’Assise et le sultan musulman d’Egypte, il s’agit de vivre une émulation spirituelle qui permette à la secrète présence de Jésus, fils de Marie, de croître d’une manière autonome dans la conscience de tous ceux qui le connaissent déjà, peu ou prou, de loin ou de près, afin d’être enfin des artisans d’une « paix sereine entre musulmans et chrétiens », comme le souhaite la septième béatitude ».

Il consacra plusieurs ouvrages et de nombreux articles à Louis Massignon : 

Massignon – Abd-el-Jalil, Parrain et filleul (1926-1962), Correspondance rassemblés et annotées par Françoise Jacquin et Maurice Borrmans, Le Cerf, 2007.

Prophètes du dialogue islamo-chrétien, L. Massignon, J.- M. Abd- el- Jalil, L. Gardet, et G.C. Anawati, Cerf,  2009.

Badaliya, au nom de l’autre (1947-1962),  textes présentés et annotés par Maurice Borrmans et Françoise Jacquin, Cerf, 2011.

Et enfin, « Prier 15 jours avec… », Nouvelle Cité, 2016, livre accessible à tous sur la spiritualité de Louis Massignon.

Les derniers mois avant sa mort, il travaillait encore à la publication d’un recueil d’articles rassemblant ses écrits épars sur Louis Massignon et augmenté de quelques inédits.

Membre du Conseil d’administration de l’Association des Amis de Louis Massignon, Maurice -puisque nous l’appelions ainsi ma mère et moi- fut aussi un ami fidèle. Il venait chez nous à Paris, lors des réunions de son Conseil d’Administration et résida plusieurs fois dans notre maison de Bretagne, lors de sa venue pour la rencontre islamo-chrétienne de Vieux-Marché (Côtes d’Armor). Il voulait à toute force célébrer les funérailles de ma mère, Nicole Massignon, s’inquiétant de sa santé chancelante et me confiant son n° de potable italien lorsqu’il partait à Rome. Il sera parti avant elle.

Bérengère Massignon